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De quoi fouetter un chat noir

11 novembre 2011

Le routard du polar : Le chinois de Henning Mankell

ChinoisAu cœur de l’hiver 2006, un loup affamé, attiré par l’odeur et le silence, se glisse aux abords d’un petit village isolé du nord de la Suède, Hudiksvall, et traîne à couvert des arbres de la proche forêt son premier repas depuis bien longtemps : une jambe humaine fraichement découpée. Ce loup sera le premier à mettre une patte sur une scène de crime effroyable où l’on retrouvera 19 personnes massacrées à l’arme blanche.

Le suédois Henning Mankell, auteur de romans policiers à succès, et particulièrement connu pour la série sur le taciturne enquêteur Kurt Wallander, entame ainsi de façon fracassante son dernier roman, Le chinois (sorti en Suède en 2008 et publié en 2011 par les éditions du Seuil). Toutefois, l’histoire de cet abominable crime tourne court. Très rapidement, il devient évident que l’enquête est le cadet des soucis de l’auteur qui a bien d’autres sujets de réflexion et d’intérêt en tête. Henning Mankell laisse, en effet, à peine le temps au lecteur de faire connaissance avec une enquêtrice pas loquace et peu avenante et d’une juge surmenée et envahissante (sorte de déclinaison peu creusée du rat des champs et du rat des villes), avant de le transporter de but en blanc dans la Chine de la fin du 19ème siècle, sur les traces d’un jeune chinois à la vie difficile. Cette première plongée dans l’Histoire va peu à peu détourner l’attention de l’auteur de la Suède et de ses crimes, pour entraîner sa plume vagabonde vers une Chine plus contemporaine et post-communiste. Quelques considérations historiques et géopolitiques plus tard, et le voilà en Afrique où il décrit l’implantation de chinois visionnaires qui voient en ce continent méprisé le nouvel horizon d’expansion de leur patrie.

L’ensemble de ces voyages dans le temps et dans l’espace se tiennent, bien sûr, grâce à un fil rouge ténu qui, lui-même, rattache l’ensemble au crime initial. Mais, p.489, on a très envie de s’écrier avec Karin, l’amie de la juge Birgitta Roslin : « Au fait, je ne t’ai même pas demandé des nouvelles de Hudiksvall. Où ça en est ? ». Mankell, en vieux routard du polar, parviendra à rassembler ses fils, convoquer tous ses personnages et finalement laisser au loup efflanqué le soin de clore l’histoire. Mais, on sent bien que le cœur n’y est pas. La forme du roman policier apparaît comme le prétexte d’un homme qui en connaît toutes les ficelles pour aborder d’autres sujets qui le préoccupent réellement. Et, porté par nulle conviction, articulé autour de personnages falots ou bien abandonnés rapidement à leur sort, ce long roman ne trouve ni son rythme, ni son équilibre. On se surprend alors à regretter la fin des aventures du héros de Mankell, l’égocentré et dépressif, tenace et taciturne Kurt Wallander.

Agnès Fleury         

Le chinois, Henning Mankell (Seuil, 2011) - Lu dans le cadre du jury Seuil policiers et Babelio

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16 octobre 2011

Pic à glace : La mort dans les yeux de Torkil Damhaug

La mort dans les yeuxLa mort dans les yeux est un polar venu du froid. Et, comme d’autres de ces romans noirs nordiques qui s’abattent sur nous depuis quelques années comme une masse d’air frais, le livre du norvégien Torkil Damhaug fait mouche.

Polar nordique

En tournant la dernière des 508 pages qui composent l’épais volume, on est tenté, une fois encore, de s’interroger sur l’engouement qui accompagne presque chaque publication de ces romans policiers sortis de l’imagination (macabre) d’écrivains du nord de l’Europe. Peut-être est-ce que la noirceur d’un crime ne ressort jamais aussi bien que lorsqu’il s’inscrit dans des paysages d’une blancheur immaculée. Peut-être est-ce que l’éclair de brutalité qui se produit au moment de ce crime n’est jamais aussi violent que lorsqu’il a lieu au milieu de l’engourdissement régnant dans des pays tétanisés par le froid et la pénombre dominante.

La mort dans les yeux est de cette veine : des paysages glacés et enneigés, l’obscurité et l’homme, tout au plus toléré par une nature peu avenante. Et puis la violence, la douleur et la mort…

Tout débute pourtant dans la lumière du soleil de Crète où quelques familles norvégiennes sont venues chercher un peu de chaleur et de repos. Rupture dans la narration et le lecteur débarque dans la vie de Liss Bjerke, une jeune femme qui porte sa beauté peu commune comme on porterait un objet utile mais encombrant. Elle s’apprête à quitter précipitamment Amsterdam avec un lourd secret pour rentrer en Norvège – où elle s’était pourtant juré de ne plus remettre les pieds. Sa sœur, jeune psychiatre talentueuse et opiniâtre, Mailin Bjerke, a disparu la veille de son passage dans une émission de télé-réalité animée par un professionnel de la provoc’. Spécialiste des violences faites aux enfants –notamment des abus sexuels -, elle comptait faire des révélations fracassantes. Dévastée, Liss se lance alors sur les traces de sa sœur adorée, s’immisçant dans les recherches de la thérapeute et dans la vie de la femme. Chemin faisant, elle va devoir accepter de se confronter à sa propre culpabilité et ses propres démons, jusqu’à être contrainte de regarder la mort dans les yeux.  

Ecriture clinique

On sait peu de choses de Torkil Damhaug, né en 1958 à Lillehammer et auteur de 5 romans, si ce n’est qu’il a une formation de médecin et une pratique de la médecine psychiatrique. Il n’est donc pas très difficile de trouver d’où vient l’importance que La mort dans les yeux accorde au corps, à la douleur physique et psychique. Quelques scènes de médecine légiste sans états d’âme, quelques passages de tortures à vous soulever légèrement le cœur, les mécanismes de l’anorexie détaillés, font de ce polar norvégien un livre où prédominent les rapports intriqués du corps et de l’esprit. Torkil Damhaug sait décrire ce qui fait mal ou révulse celui qui est spectateur (ou lecteur) de ces moments mettant en scène un corps malmené.

Et si on devait enfoncer le clou (si je puis dire), on pourrait aussi évoquer l’écriture au scalpel de l’auteur. Là encore : clinique. Peu ou pas d’effet de style, de la longueur mais pas de relâchement dans le rythme ; le style du norvégien se met totalement au service de son histoire.

On notera simplement que l’auteur est plus à l’aise à écrire la fuite désespérée d’une victime dans la neige norvégienne que celle, toute aussi pathétique, d’un autre type de victime, dans le sable brûlant de Crète. Comme quoi, même un écrivain ne se délocalise pas toujours facilement.

Agnès Fleury         

La mort dans les yeux, Torkil Damhaug (Seuil, 2011) - Lu dans le cadre du jury Seuil policiers et Babelio

22 mai 2011

Les terres grises : Le silence pour preuve de Gianrico Carofiglio

SilenceGianrico Carofiglio ne fait pas profession d’écrivain. La biographie de cet italien le présente surtout comme un magistrat et sénateur de la région des Pouilles. Mais il se trouve qu’il écrit aussi. Et plutôt bien. Sa plume est classique mais efficace, précise et sans fioritures mais évocatrice. Un style que l’on aime penser à l’image de l’homme ; Gianrico Carofiglio est, à n’en pas douter, un magistrat très investi dans la vie politique italienne qui possède, en outre, une culture littéraire et classique très solide, si l’on s’en réfère aux nombreuses (et très bien choisies) citations qui émaillent le texte de son roman paru en 2009 et traduit en 2011 pour Le Seuil Policiers. C’est donc sans surprise – mais avec plaisir – que Le silence pour preuve nous fait découvrir un héro taillé dans le même bois que celui de son auteur. L’avocat Guido Guerrieri (dont c’est la quatrième aventure) est un homme de loi qui aime, lui aussi, s’aventurer sur d’autres terres que celles des salles d’audiences feutrées. L’homme, la quarantaine fatiguée et nonchalante, sait s’improviser enquêteur amateur à l’occasion de certaines de ses affaires et des demandes de ses clients.

Dans Le silence pour preuve, c’est un de ses confrères qui lui présente un cas épineux et dramatique. Manuela, une jeune étudiante de Bari, a disparu depuis 6 mois. De retour de vacances, elle s’est tout simplement volatilisée. Depuis, le silence s’est installé : pas de signe de vie (ou de mort), pas de témoins, aucune raison invoquée. Alors que le procureur s’apprête à classer une affaire qui n’en est plus vraiment une aux yeux de la police et de la justice italiennes, les parents de la jeune fille, désespérés, jouent leur dernière carte. Ils convainquent Guido Guerrieri de reprendre l’enquête afin de trouver des éléments nouveaux qui permettraient à l’affaire de ne pas être abandonnée. L’avocat accepte avec réticence de mener quelques investigations qui s’avèreront fructueuses…

Une disparition, très peu de témoins - tous silencieux, un travail sur le passé et les souvenirs : « Pourquoi cette fille normale ayant une vie normale et une famille normale avait-elle, du jour au lendemain, disparu dans le néant ? »*. La trame de l’histoire est d’une simplicité biblique… et le restera jusqu’au dénouement. Tout le charme de ce legal thriller – qui porte d’ailleurs bien son nom car on y apprend quelques principes de droit et de procédure italiens exposés avec précision et un certain sens didactique – repose sur cette simplicité. Pas de cavalcades, pas de rebondissements extravagants, pas même de grands moments de prétoire… Et pourtant, un vrai suspens est maintenu très habilement tout au long du livre. Car la tension ne repose, en effet, pas tant sur les faits ou l’action que sur quelques personnages forts et leurs non-dits criants. Le personnage du héro, Guido Guerrieri, n’est d’ailleurs pas le moins mystérieux. Il sait s’aventurer entre deux eaux, là où la culpabilité et l’innocence ne sont pas des concepts toujours bien définis, prédéterminés et prévisibles. Ce sont des terres grises qui peuvent mener ceux qui les foulent à l’aigreur et au cynisme. Mais, c’est plutôt l’humour et la mélancolie qui affleurent au fil des pages de ce roman policier nonchalant.

Ainsi, Gianrico Carofiglio parvient à faire du Silence pour preuve un polar tout aussi efficace qu’attachant et prouve, à la suite de son héro, qu’on peut bien mener deux vies de front : être un magistrat intraitable et un bon écrivain de roman noir.

Agnès Fleury         

* Extraits de Le silence pour preuve : une enquête de l’avocat Guido Guerrieri, Gianrico Carofiglio (Seuil, 2011) - Lu dans le cadre du jury Seuil policiers et Babelio

30 mars 2011

Livre en série(s) : Jeux de vilains de Jonathan Kellerman

Jeux_de_Vilains_4d63f214b4421Je regarde sans doute trop la télévision pour apprécier pleinement la lecture de Jeux de Vilains de Jonathan Kellerman, la 22ème aventure du héro récurrent de l’auteur (du moins, en version française, car depuis deux de plus ont paru aux Etats-Unis). Tout, dans ce livre, évoque un de ces épisodes des Experts, Bones (!), NCIS (ou quelque autre de ces séries qui laissent à penser que les Etats-Unis sont la patrie des serial killers et que le taux de criminalité fédérale doit être extravagant) que l’on regarde paresseusement les soirs de léthargie, en se promettant que ce sera le dernier. Tout, sauf le temps qu’on y consacre… En effet, avec ses 439 pages – qui n’en finissent pas de détails et de rebondissements superflus – Jeux de vilains est loin des 45 minutes calibrées des dites séries américaines, calibrées au cordeau.


Mais, venons-en à l’histoire. On l’entame avec deux teasers (là encore, la technique est largement empruntée à l’écran) :

Alors qu’il s’ennuie à périr à assurer la permanence d’une association de défense du marais local au titre d’heures consacrées à des travaux d’intérêt général, un jeune et riche glandeur reçoit un étrange appel téléphonique ; une voix déguisée et sifflante lui annonce la présence d’un cadavre flottant dans le marais.

Après avoir remporté l’enchère d’un box à moitié vide et mis en vente, car abandonné, un paysagiste en quête de moyens pour arrondir ses fins de mois s’apprête à mettre en vente sur ebay le seul objet de valeur qu’il y a trouvé : une boîte à bijou en bois précieux. Malheureusement, les 42 petits os qu’elle contient vont l’obliger à céder son trésor à la police. En effet, ces 42 petits os représentent l’équivalent de 5 mains humaines.

En soient, ces teasers sont prometteurs… Malheureusement, ils s’avèrent assez anecdotiques car ils ne se raccordent pas de façon très convaincante à l’enquête principale.

Quant au corps de l’enquête, c’est du traditionnel.

Le lieutenant Milo Sturgis, aidé de son ami Alex Delaware, psychologue pour enfants et consultant pour la police, secondé d’un jeune inspecteur (blanc), Moe Reed, et du demi-frère de celui-ci, le privé Aaron Fox (noir), ainsi que de trois anthropologues et de sept physiciens (non, je plaisante pour les physiciens… mais, ça fait quand même beaucoup de monde pour développer la fine analyse psychologique des personnages qu’on serait en droit d’attendre de la part d’un auteur, psychologue de formation) enquête sur le meurtre de plusieurs femmes étranglées et mutilée de leur main droite.

Les ingrédients d’une série à succès sont bien présents : meurtres en série, rituels, ossements, prostitution, une pointe de sado-masochisme… Et pourtant, la recette ne prend pas. De même qu’on se sentait déconnecté de personnages assez inconsistants, on ressent peu d’émotions au déroulé de l’histoire, pas même d’impatience à en connaître le fin mot, puisque le suspens est éventé 100 pages avant la fin.

Le style, peut-être ? Pas vraiment. Plutôt ronronnant. Jonathan Kellerman sait écrire et connaît les ficelles de narration du polar (ou du scénario de polar), mais sa technique n’apporte pas de "supplément d’âme" à son histoire. Ca sent son livre en série. A noter, une étrangeté stylistique qui vient conforter le lecteur dans son impression d’être dans son canapé face à son écran : Les dialogues sont assez déstabilisants, car ils manquent de marques d’énonciation. Ce qui fait qu’on est très souvent perdu et qu’on ne sait jamais vraiment qui prend la parole et pour répondre à qui… Si encore on avait l’image… ce serait moins problématique. Mais, dans le cas présent, cette ambiguïté vient surtout souligner combien les personnages sont interchangeables et peu caractérisés.

La très bonne idée du livre ne vient donc ni de l’intrigue, ni des personnages, mais du lieu où sont retrouvés les cadavres : un marais préservé au cœur de Los Angeles (près de Marina del Rey), une trouée verte et visqueuse dans un paysage urbain. Cet élément naturel dégage une atmosphère immédiatement perceptible et fait travailler l’imaginaire. La meilleure phrase du roman est donc certainement celle-là : "Rien que des oiseaux et des grenouilles qui pionçaient au moment crucial"*.

Agnès Fleury          

* Extraits de Jeux de vilains : une enquête d'Alex Delaware, Jonathan Kellerman (Seuil, 2011) - Lu dans le cadre du jury Seuil policiers et Babelio

3 mars 2011

Douilles, huile de vidange et armoire à pharmacie : Le paradis (ou presque) : une mésaventure de Hank Thompson, Charlie Huston

23_1046326« J’ai aidé un ami. J’ai essayé de protéger des gens. J’ai tout fait du mieux que j’ai pu, mais le seul truc que j’ai réussi à faire, c’est de buter ceux qui voulaient me tuer. Ensuite j’ai pris leur argent »*. Ca, c’est ce qu’il s’est passé il y a quelques années – et dans le premier épisode de la trilogie Hank Thompson, Increvable (paru au Seuil en 2010).

Hank Thompson : épisode 2

Depuis, le héro de Charlie Huston tente de se faire oublier sur une plage du Mexique, loin de la frontière américaine où les autorités fédérales, la mafia russe et tous les spectateurs de America’s Most Wanted se souviennent un peu trop bien de lui et de la trainée de sang qu’il a laissée derrière lui. Les premières pages de ce deuxième épisode s’ouvrent donc sur un Hank Thompson, physiquement méconnaissable, qui tente de couler des jours heureux sur la véranda d’un bungalow de la Péninsule du Yucatan. Toutefois, lui-même peine à croire que ce paradis (ou presque) durera éternellement. Malgré les baignades sans fin dans l’eau turquoise et les déjeuners savoureux que son ami Pedro lui prépare dans sa paillote sur la plage, la tension est déjà palpable sous le sable et les cocotiers – sans doute le meilleur moment du livre. Une rencontre importune, qu’Hank ne faisait qu’attendre sans savoir qu’elle forme elle prendrait, fait basculer le fragile équilibre. Et, c’est parti : la fuite incessante, qui fait de Le paradis (ou presque) un road movie halluciné et amphétaminé. Au fil des pages et des matchs de la saison régulière de football américain (sport qu’il exècre mais dont il suit l’actualité compulsivement), du Yucatan à Las Vegas, les cadavres et les carcasses de voitures recommencent à s’accumuler derrière Hank Thompson.

En plein Pulpnoir

Très vite, on est en plein pulp noir, un genre littéraire dont se revendique Charlie Huston (voir d’ailleurs son site/blog : http://www.pulpnoir.com/) qui utiliserait les techniques du roman noir en le tirant vers le pulp ou littérature de gare en anglais. Comme dans ce genre de littérature qui recycle les codes des comics, des magazines populaires, des jeux vidéo… tout est très visuel et sonore. « Je lui raconte toute l’histoire, avec des illustrations et des exemples tirés de films, de livres, de musique pop, de la philosophie grecque, sans compter les digressions vers d’autres sujets comme la politique dans les médias, Superman contre Batman, le Chat de Schrödinger […] »*. Ainsi, sur une bande son très référencée et à coups d’images préfabriquées, véhiculées par la culture populaire, Charlie Huston déroule son histoire qui (il s’en vante souvent, avec autodérision, par la voix de son héro) ne pèse pas lourd. Hémoglobine, cachetons de percs (percocet = analgésique), tatouages et strip-tease ; tout est si visuel que le livre se porte de lui-même vers l’écran, couleurs criardes et montage survolté à l’appui. Et la réserve vient donc de là. A l’écrit, la succession d’actions rapides se révèle moins efficace que sur un écran et le risque est alors réel de faire décrocher un lecteur, fatigué par la répétition et une lecture hachée par les verbes d’action.

Hank : un anti-héro ?

D’après la quatrième de couverture, Le paradis (ou presque) est l’épisode préféré de la vie de Hank de son auteur, Charlie Houston, car c’est là qu’il lui apparaît le plus humain. C’est un sentiment sur lequel on pourra rejoindre l’auteur car tout l’intérêt du livre repose bien sur les (larges) épaules de ce héro ou, plutôt, de cet anti-héro. Car du sous-titre (une mésaventure…) à la grande majorité du livre, l’auteur nous balade à la poursuite d’un anti-héro : « Il m’expliquait qu’il savait que je n’avais pas réfléchi, que j’étais un bon gars qui, s’il s’était arrêté un instant pour réfléchir, aurait agi intelligemment »*. On serait alors bien tenté de croire que Hank Thompson est celui par qui les choses arrivent mais qui ne les souhaitent pas, celui qui se passerait bien d’être là et celui autour duquel les cadavres s’amoncellent comme par malheur. Mais qu’on ne s’y trompe pas ; Hank est aussi celui que tous – et surtout les pires – admirent. Et pour cause. A de brefs moments, l’assassin parle en lui : « J’ai l’expérience de cette violence brutale. Et la violence c’est comme le reste, plus on s’y adonne, plus on s’y habitue. Et plus on se perfectionne »*. Sans attaches, sans remords, sans amours ni sexe, Hank Thompson est un homme impitoyable... qui finit par l’admettre : « Si je l’observe c’est parce que je veux vraiment savoir à quoi ressemble un homme dangereux. Parce que c’est ce que je suis en train de devenir. C’est ce que je vais être »*.

Le paradis (ou presque) est l’histoire d’un homme dangereux et un livre plus insidieux qu’il n’y paraît.

 

Agnès Fleury

* Extraits de Le paradis (ou presque) : une mésaventure de Hank Thompson, Charlie Huston (Seuil, 2011) - Lu dans le cadre du jury Seuil policiers et Babelio

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28 février 2011

Jury Seuil Policiers/Babelio

jury_polarJury Seuil Policiers/Babelio : un nouveau blog pour l'occasion. Un espace pour parler du polar.

Toujours ouvert, mon blog de portraits littéraires : http://fouetterunchat.canalblog.com

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